Portrait de Lyonnais : le réalisateur Bertrand Tavernier

Portrait de Lyonnais : le réalisateur Bertrand Tavernier
Photo libre de droit @vincenzo D'Alto

Un nouveau format "Portrait de Lyonnais", qui part à la rencontre de lyonnais et lyonnaises emblématiques.

Tous les cinéphiles vous le diront : la ville de Lyon est étroitement liée à l'histoire du cinéma. Si c'est dans la rue Saint-Victor - rebaptisée rue Premier Film - qu'est né le cinéma, c'est aussi là que se déroule chaque année un festival prestigieux, le festival Lumière. Une célébration qui n'aurait pas été la même sans l'homme qui en a été le président pendant plus de 29 ans, le réalisateur Bertrand Tavernier, un lyonnais passionné de 7ème art... mais aussi de ses racines lyonnaises. 

Un amour pour Lyon depuis sa tendre enfance 

Né le 21 avril 1941, Bertrand Tavernier est le fils de l'écrivain et résistant René Tavernier, ce qui explique sans doute pourquoi, dès le plus jeune âge, il a été initié à l'amour de la littérature, des débats politiques et du 7ème art. C'est d'ailleurs dans les salles obscures que le petit Bertrand se réfugie lors de son enfance, marquée par des soucis de santé. Très vite, il découvre différents films, de tous genres confondus, et se passionne pour le cinéma, qui deviendra bientôt son métier. Un souvenir que le réalisateur a chéri jusqu'à sa mort, considérant la ville comme un foyer d'inspiration

« Lyon m'a appris un enracinement dans un lieu. Je suis provincial et content de l'être, je ne me sens pas parisien. » - Bertrand Tavernier 

Cet amour pour la ville, Bertrand Tavernier l'a illustré dans son tout premier film sorti en 1974, "L'Horloger de Saint Paul". L'histoire d'un commissaire - campé par Jean Rochefort - qui mène l'enquête sur un meurtre commis par le fills d'un horloger, interprété par Philippe Noiret. Et comme le suggère subtilement le titre, le film a été tourné en grande majorité dans le quartier Saint-Paul, dans les ruelles et les quartiers que Bertrand a beaucoup arpenté quand il était petit. Une déclaration d'amour à peine voilée, puisque le réalisateur n'a cessé de revenir dans sa ville natale, que ce soit pour des tournages, des événments ou des activités culturelles. 

Fier défenseur du patrimoine cinématographique lyonnais 

Au-delà du cinéma, Bertrand Tavernier s'est beaucoup impliqué dans la préservation du patrimoine et de l'héritage cinématographique de la ville. Dans les années 1970, le site des usines Lumière est menacé de démollition, et Tavernier se bat pour préserver ce lieu historique. Résultat ? Aux côtés de Thierry Frémaux, il cofonde l'Institut Lumière, un lieu majeur entièrement dédié à la mémoire du cinéma, et qui a réussi à conserver une partie du hangar d'origine, celui-là même que l'on aperçoit dans le tout premier film des Frères Lumière

Mais ne croyez-pas qu'en tant que président de l'Institut Lumière, Tavernier restait derrière son bureau à se tourner les pouces, bien au contraire ! Il était très impliqué, et organisait régulièrement des rétrospectives, des hommages à des réalisateurs et réalisatrices, et soutenait la recherche autour de films rares et classiques. C'est aussi lui qui, en 2009, inaugure en grande pompe le Festival Lumière, rendez-vous incontournable pour tous les cinéphiles du monde entier

Une figure très appréciée des Lyonnais

Son amour pour la ville était aussi palpable dans ses interviews et ses prises de parole publiques, où il parlait souvent de la richesse culturelle et historique de Lyon. En 2020, France 3 et ses antennes régionales décident de réaliser un documentaire "Les secrets de la belle endormie", recueillant des images de drones filmant les grandes villes françaises confinées. Et sur la partie lyonnaise, c'est Bertrand Tavernier qui fait la voix off, toujours aussi fasciné par les bâtiments et les cours d'eau lyonnais. 

« Ses façades colorées, ses teintes ocres, vertes, roses, qui avaient disparu sous la suie, la pollution industrielle. Ils illuminent et réchauffent ces berges. Enfant, j’adorais rêver sur les berges du Rhône pas encore domestiquées. Quand on voit ces quais, ces rives, on sent, même en cette époque de confinement où ils sont déserts, comme inanimés, qu’ils ont été conçus pour accueillir, échanger et redistribuer des voyageurs, des marchandises… qu’on doit là imaginer. Ces deux voies d’eau, comme deux immenses avenues font respirer la ville et l’ouvre sur le monde. Ils mettent à mal cette réputation de soi-disant repli sur soi qu’on accole à Lyon et à ses habitants. » - Bertrand Tavernier 

Un an plus tard, le réalisateur nous quittait, en mars 2021. Une nouvelle qui a peiné les lyonnais, tant l'homme était apprécié, autant pour sa carrière cinématographique que pour son engagement envers la ville. Encore aujourd'hui, son empreinte reste immense. Grâce à ses initiatives, comme l'Institut Lumière et le Festival Lumière, il a contribué à faire de Lyon un lien incontournable pour les fans de cinéma. Son lien indéfectible avec la ville témoigne d’un amour réciproque : celle d'une histoire entre un cinéaste de génie, et la ville qui l'a vu grandir et dont il a fait sa muse